You are currently viewing Les coulisses de la conception du monde du jeu

Quand on sait que des personnages non-joueurs (PNJ) comme Dark Malgus, Tau Idair et bien d’autres seront au cœur de la prochaine extension « Onslaught », on se doute bien que leur création est le fruit d’une intense réflexion. Mais qu’en est-il des PNJ moins connus, comme ce type arrogant dans la cantina ou ce vendeur tapi dans une ruelle sombre ? Afin de mieux comprendre le processus de création des divers personnages qui peuplent l’univers de Star Wars: The Old Republic, nous avons interrogé Dave Shramek, responsable de la conception du monde du jeu. Dans cette plongée en coulisses, nous nous intéresserons à la création de l’un des gangs régnant sur la nouvelle planète, Mek-Sha.

Pour commencer, pourriez-vous vous présenter et décrire en quelques mots votre rôle au sein de l’équipe ?

Bien sûr. Je m’appelle Dave Shramek, je suis responsable de la conception du monde. Dans SWTOR, cela signifie que je suis responsable de toutes les parties narratives du jeu autres que les cinématiques, le scénario et les visuels d’environnement. Je crée l’aménagement de ces derniers. J’intègre les éléments du scénario à notre outil de création de Missions, de sorte que si, pour une Mission, vous devez parler à un personnage, ce personnage existe dans l’univers et vous pouvez lui parler. Si la Mission prévoit un combat, je fais en sorte que le personnage se batte, je lui assigne des pouvoirs, et même une musique de combat. Si un objet doit être récupéré durant la Mission, je m’assure qu’un personnage possède (ou qu’un objet contienne) l’objet en question, et que celui-ci présente toutes les informations attendues : une icône, une description, un effet d’utilisation si besoin… Quand vous cliquez sur un objet, j’assemble les différents éléments visuels en un objet interactif qu’on appelle un « plaçable dynamique ». Cela veut dire que vous pouvez cliquer dessus, et qu’il passera par différents états. Par exemple, si vous cliquez sur une caisse, elle s’ouvrira, et il y aura des objets à l’intérieur tant que vous ne les aurez pas récupérés. Une fois que vous aurez tout pris, elle sera vide.

Les joueurs pourraient s’attendre à ce que votre travail comprenne certains éléments que vous avez mentionnés, comme la création de Missions, le placement des PNJ, etc. Le travail du concepteur de monde comporte-t-il des tâches moins attendues ?

Ce que l’on fait en conception de monde a évolué avec le temps, mais puisque nous sommes chez BioWare, un élément reste immuable : la narration est au centre de notre travail. Lorsque nous peuplons une zone avec des PNJ d’ambiance ou des ennemis, ils interagissent avec le monde. Quand vous avancez dans une instance, des ennemis qui, jusqu’alors, se contentaient de discuter entre eux ou d’utiliser un ordinateur, commencent à pointer leurs armes vers le bout du couloir, car ils savent désormais que vous arrivez. Si le monde change à cause d’un élément du scénario, comme des bruits d’explosions ou des alarmes qui se déclenchent quand vous vous échappez, ça fait partie de notre travail. Si un scénariste précise dans ses notes qu’un personnage est un « businessman véreux et arrogant », nous essayons de lui créer une apparence mettant en valeur ces aspects de sa personnalité. J’aime beaucoup ce que j’ai fait pour la chaîne de Missions de Contrebandier sur Coruscant. Le Contrebandier envahit le QG d’un gang pour sauver une pirate nommée Kixi, et quand ils arrivent devant la porte de sa cellule, elle est verrouillée. Quand j’ai conçu le panneau de porte, j’ai créé une capacité spéciale pour que le Contrebandier dégaine son arme, la fasse tournoyer et tire sur le panneau. J’ai nommé cette capacité « Déverrouillage » pour que ce soit affiché sur la barre de sorts.

Vous avez mentionné la création de l’apparence des PNJ. Pourriez-vous développer cet aspect ? Est-ce que cela ressemble à l’habillage d’un personnage joueur, ou y a-t-il des différences ?

Lorsque nous habillons les PNJ, nous avons accès à des options que les joueurs n’ont pas. Certaines de nos tenues, par exemple, sont constituées d’ornements que nous pouvons garder ou non selon le niveau de raffinement que nous voulons donner au personnage, ce qui nous permet de diversifier les tenues. Si un ennemi peu dangereux est équipé d’une armure de contrebande, je peux lui retirer ses épaulettes lourdes ou ses protections de coudes. Je peux enlever les lunettes du casque d’un personnage pour que les joueurs puissent voir ses yeux pendant les cinématiques. Je peux également supprimer les éléments plus complexes d’une paire de bottes : un marchand lambda ne portera pas de houseaux d’armure lourde, mais plutôt de solides bottes en cuir artificiel. Quand la palette de couleurs à notre disposition est large, nous pouvons plus facilement assortir les différentes pièces d’équipement sans noyer les illustrateurs sous les demandes. Les nouvelles pièces, notamment, ont des propriétés matérielles légèrement différentes, qui peuvent saturer ou faire briller une couleur plus qu’une autre. Je dois alors utiliser une teinte de rouge un peu différente pour harmoniser l’ensemble complet.

Sur la nouvelle planète Mek-Sha, l’un des gangs les plus puissants est un groupe d’ex-Mandaloriens qui travaille pour un homme nommé Indigo. Son nom devait bien avoir une origine, alors j’ai assemblé tout un tas de pièces d’armure lourde pour essayer de leur donner la même teinte de couleur… indigo. Certaines sont d’un métal plus brillant, tandis que d’autres ont cet aspect plus plastique que l’on attend généralement d’une armure de soldat.

Le reste du gang d’Indigo ne joue pas un rôle direct dans l’histoire, mais l’un des meilleurs côtés de la galaxie Star Wars, c’est que derrière chaque personnage d’arrière-plan, on peut imaginer une histoire fascinante. C’est le genre de sentiment que nous souhaitons créer grâce aux PNJ peuplant l’Ancienne République. C’est ce que je veux dire lorsque je parle de raconter une histoire à travers les costumes. On peut en dire beaucoup rien qu’avec la façon dont on habille les personnages. Pour le gang d’Indigo, composé d’ex-Mandaloriens, je peux assembler différentes pièces. Puisqu’ils ne sont plus Mandaloriens, ils sont probablement obligés de voler pour obtenir leurs armures. Indigo est le chef, il garde donc les meilleures pièces. Gizka, lui, est le « gamin » du groupe, son armure est la plus dépareillée, la plus bricolée. Lorsque je choisis les tenues de Mandaloriens ou même d’ex-Mandaloriens, j’accorde beaucoup d’importance à ce qu’ils aient tous un look similaire et manifestement Mandalorien, tout en conservant une sorte d’individualisme.

La tenue de ces Mandaloriens serait-elle liée à leur comportement en combat ?

Tout à fait. Prenez Beskad, par exemple. Elle tire son nom de la célèbre épée Mandalorienne, car de toute l’équipe, elle est la plus dangereuse avec une telle arme dans les mains. En combat, elle aurait des pouvoirs de mêlée. Sa tenue comporte des pointes sur les épaulettes, ses charges de l’épaule seraient donc puissantes. Ses gantelets sont également pourvus de pointes, on lui donnerait donc un bon revers ou des attaques au poing. Elle a aussi un couteau caché dans sa botte, alors elle pourrait aussi avoir une attaque taillade, comme les Agents. Tout est lié au personnage. L’histoire nous donne des informations sur le personnage, et son apparence nous en dit plus, ou nous laisse développer sa personnalité d’une manière spécifique. Et cela nous dit comment se comporterait le personnage en combat. Nous faisons en sorte que tous nos choix servent à alimenter l’histoire. Indigo a une sorte de cape sur son armure parce qu’il est le chef et qu’il s’inspire, d’une certaine façon, du look « Mandalore la Vengeresse » de Shae. Mais avec ça, il ressemble un peu à un Clint Eastwood en armure lourde, alors s’il devait combattre, il serait meilleur tireur que la plupart des Mandaloriens.

Pouvez-vous nous dire comment vous avez décidé des couleurs du gang d’Indigo ? L’équipe avait-elle une raison ou un thème spécifique en tête lors du choix des combinaisons de couleurs, des équipements, etc. ?

Lorsque je travaillais sur les Mandaloriens pour le chapitre Darvannis de Knights of the Fallen Empire, j’ai créé 37 apparences uniques. J’ai conçu une armure Mandalorienne et une combinaison de couleurs spécifique aux infirmiers, puis trois groupes classés selon leurs armes (un gros blaster, deux blasters plus petits, ou un fusil). Au sein de chaque groupe, j’ai créé huit apparences différentes selon la morphologie des personnages. Là encore, je pense que les Mandaloriens seraient du genre à exprimer leur individualité, alors j’ai essayé de choisir deux couleurs complémentaires que je n’avais pas déjà utilisées.

Pour le gang d’Indigo, j’ai dû être plus spécifique. Indigo était le seul pour qui je devais suivre une certaine palette de couleurs. Ensuite, je voulais un rendu vivant et unique pour tous, comme sur Darvannis, mais je souhaitais aussi m’éloigner de couleurs qui ressembleraient trop à Indigo. Je me suis dit que les autres personnages lui laisseraient sa couleur. L’un d’entre eux, Forge, utilise une protection de buste et un casque de Mandalorien charismatique, car c’est elle qui s’assure que les équipements qu’ils se fabriquent ont la personnalité, le style qu’ils recherchent, et qui garde le tout en ordre. Bien que nous ayons accès à un plus grand nombre d’options de couleurs lorsque nous créons l’apparence des personnages, nous ne pouvons toujours changer que deux couleurs de la tenue, tout comme les joueurs utilisant des modules de teintures. Sur l’armure de Mandalorien charismatique, il y a une partie orange qui ne peut être modifiée, je devais donc forcément mettre beaucoup d’orange sur l’armure d’un personnage.

Les jumeaux Talon et Ranger sont des tireurs d’élite, alors j’en ai fait des chasseurs. Leur armure est ornée de trophées, de crocs, de griffes et de fourrure, mais garde l’apparence naturelle du cuir, et des couleurs leur permettant de se camoufler efficacement dans les rochers et les environnements naturels. Dans certains cas, j’ai choisi un type particulier de pièces d’armure pour jambes, dont la texture correspond à celle de la protection de buste que j’utilisais, mais l’une de ces deux textures n’existait qu’en gris anthracite. Dans ce cas, pour l’autre pièce, je devais tenter d’obtenir un gris similaire avec l’une des deux options de couleur à ma disposition. Si un ensemble présente une certaine couleur accentuée, je peux essayer de trouver des pièces me permettant de dupliquer cette couleur accentuée sur d’autres pièces pour harmoniser leur apparence. Mes décisions sont donc parfois dictées par les disponibilités. L’armure de Slice, le pirate informatique du groupe, est plus technologique que celles des autres Mandaloriens, avec des câbles rouges qui traversent la protection de buste. Quand j’ai choisi les pièces de jambes, j’ai opté pour des équipements sur lesquels je pouvais reproduire cette teinte rouge, afin d’uniformiser le tout.

Une dernière question. Quelle facette du gang d’Indigo êtes-vous impatient de voir les joueurs découvrir quand ils arriveront sur Mek-Sha ?

Il y a plusieurs gangs criminels sur Mek-Sha. Indigo est l’un d’entre eux, et la nature de vos interactions avec ce gang dépendra de votre passé. Puisque tous ses membres sont des ex-Mandaloriens, ils n’apprécieront pas forcément que vous ameniez Shae ou Torian avec vous pour les rencontrer. Et si vous êtes vous-même Mandalorien, ce sera pire.

Merci pour toutes ces réponses, Dave ! Nous vous rappelons que si le rôle du gang d’Indigo sur Mek-Sha est mineur, sa conception a été longuement réfléchie. Imaginez un peu ce que donnera le contenu principal ! Si vous souhaitez avoir plus d’informations sur l’extension « Onslaught », n’oubliez pas de garder un œil sur nos actualités.

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